Jugements du 19 mars 2019
Contexte :
46 sapeurs-pompiers professionnels du SDIS de Meurthe-et-Moselle ont demandé au président de cet établissement public le paiement des heures supplémentaires qu’ils estiment avoir assurées au cours des années 2012 et 2013. Ils considèrent que toute heure effectuée au-delà de 1607 heures annuelles est, comme pour toute la fonction publique, une heure supplémentaire. Toutefois, la spécificité des fonctions qu’ils occupent justifie qu’il ait été dérogé à cette règle par un décret du 25 aout 2001 qui a mis en place un régime d’équivalence horaire en cas de gardes supérieures à 12 heures.
Ce régime d’horaire d’équivalence a été institué par l’article 4 du décret du 31 décembre 2001, qui constitue un mode particulier de comptabilisation du travail effectif pour les sapeurs-pompiers astreints à des gardes de vingt-quatre heures et qui consiste à prendre en compte la totalité des heures de présence, tout en leur appliquant un mécanisme de pondération tenant à la moindre intensité du travail fourni pendant les périodes d’inaction. Ce même article prévoit que, par délibération, le conseil d’administration du SDIS peut majorer ce temps d’équivalence.
C’est sur fondement que par une délibération du 17 décembre 2003 le conseil d’administration du SDIS de Meurthe-et-Moselle a prévu qu’à compter du 1er janvier 2004, le décompte du temps de travail d’un sapeur-pompier logé serait réalisé sur la base « de 120 gardes de 24 heures ou équivalent », ce qui correspond à 2 880 heures par an.
Une délibération illégale au regard du seuil communautaire :
Dans ses jugements du 19 mars 2019, le tribunal considère que les pompiers ne peuvent prétendre calculer les heures supplémentaires à partir du seuil de 1607 heures prévu pour la fonction publique, puisqu’un texte spécifique prévoit que leur situation déroge au droit commun.
En revanche, le tribunal constate que le seuil de 2880 heures annuel fixé par le conseil d’administration du SDIS excède le seuil de 2256 heures annuel, fixé par la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003, qui est imposé aux Etats membres afin que soient respectés les impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs. Par conséquent, en adoptant une délibération illégale, le SDIS de Meurthe-et-Moselle a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.
L’indemnisation des pompiers justifiant du dépassement du seuil de 2256 heures :
Tirant les conséquences de ce constat, le tribunal administratif a décidé d’indemniser les pompiers qui avaient, au titre de 2012 et/ou de 2013, dépassé le seuil de 2256 heures : 33 pompiers ont ainsi été indemnisés entre 100 et 2200 euros. Ont par contre été rejetées les demandes de ceux qui n’avaient pas atteint ce seuil.
Pour tous les pompiers, le tribunal a rejeté les demandes tendant à une indemnisation des troubles dans les conditions d’existence en raison de l’absence de demande préalable (article R. 421-1 du code de justice administrative). En outre, 300 euros ont été mis à la charge du SDIS au titre des frais de procédure exposés pour chaque pompier indemnisé.