Il est difficile de comprendre la spécificité du tribunal administratif de Grenoble sans revenir sur l'histoire de l'institution à laquelle il a succédé, le conseil de préfecture de l'Isère.
Comme les autres conseils de préfecture, celui de l'Isère a été créé par le Consulat (loi du 28 pluviôse an VIII - 17 février 1800). Cette institution devait remplir, auprès du préfet, des fonctions à la fois consultatives et contentieuses, sur le modèle des fonctions exercées par le Conseil d'Etat auprès du gouvernement.
A l'origine, le conseil de préfecture de l'Isère est composé de 5 membres et il est présidé par le préfet. Les conseillers de préfecture sont nommés par le gouvernement. Jubié, Joly, Maurel, Alricy et Dubouchage, les cinq premiers conseillers de préfecture de l'Isère ont déjà tous une expérience des affaires publiques acquise sous l'Ancien régime ou la Révolution.
La loi du 28 pluviose an VIII est restée muette sur la procédure à suivre devant les conseils de préfecture. Cette lacune ne sera comblée qu'en 1865. Mais dès 1831, le préfet de l'Isère Gasparin fit œuvre de précurseur en étendant au conseil de préfecture, statuant sur les contraventions de grande voierie, les principales réformes réalisées au Conseil d'Etat : il crée un greffe, rend les audiences publiques et les débats oraux. Grâce à cette initiative, en 1847 le conseil de préfecture de l'Isère est le seul dont les audiences soient publiques et la discussion orale. Ces innovations seront généralisées à tous les conseils de préfecture par les décrets des 30 décembre 1862 et 18 juillet 1865 et la loi du 21 juin 1865.
Par la suite, les conseils de préfecture connaîtront quelques réformes, notamment l'importante loi du 22 juillet 1889, qui organise plus précisément la procédure devant les conseils de préfecture. En 1926, ces conseils deviennent interdépartementaux. Ainsi, le ressort du conseil de préfecture de Grenoble s'étend alors sur les 5 départements de l'Isère, de la Drôme, de la Savoie, de la Haute-Savoie et des Hautes-Alpes (ce dernier département étant maintenant dans le ressort du tribunal administratif de Marseille). Il se compose d'un président et de 4 conseillers, dont l'un est chargé des fonctions de commissaire du gouvernement, nommés par décret sur proposition du ministre de l'intérieur.
Mais la profonde réforme que connaîtra le contentieux administratif (qui doit faire face à une hausse du nombre d'affaires portées devant le Conseil d'État) sera celle mise en place par le décret du 30 septembre 1953 : au conseil de préfecture succède le tribunal administratif, qui devient désormais le juge de droit commun du contentieux administratif alors que jusqu'alors, les conseils de préfecture restaient soigneusement tenus à l'écart du contrôle de la légalité des actes de puissance publique. Vous pouvez voir un des premiers jugements du tribunal administratif de Grenoble, en date du 24 novembre 1954.
Le Conseil d'Etat n'est plus, sauf quelques cas limitativement énumérés, le juge de premier ressort mais devient le juge d'appel.
Cette réforme n'a toutefois pas suffit à résoudre le problème de l'encombrement du Conseil d'Etat. C'est ainsi que la loi du 31 décembre 1987 crée les cours administratives d'appel, le Conseil d'Etat devenant, pour l'essentiel, juge de cassation.
Aujourd'hui, le tribunal administratif de Grenoble compte 30 magistrats regroupés en 7 chambres spécialisées (voir composition du tribunal), assistés par 5 assistants de justice et environ 40 agents de greffe. En 2005, 6700 nouvelles requêtes ont été enregistrées et 24 magistrats (représentant 22 temps plein) ont jugé 5750 affaires.